Compétence-Engagement DÉBORAH DIALLO « Une brillante avocate »
Avocate française d’origine guinéenne, elle est inscrite au Barreau de Strasbourg. Indépendante, elle est compétente en droit privé (droit pénal, droit des étrangers, droit de la famille) et en droit des affaires (conseil, transactions immobilières). Voici Maître Déborah Diallo .
C’est en Grèce au National and Kapodistrian University of Athens qu’elle effectue une partie de ses études dans le cadre du programme Erasmus. Elle se rendra ensuite en Italie au compte du Programme de Droit International de l’Université de Prato. Diplômée en Droit International et Européen, Maître Diallo a travaillé au Cabinet d’avocat international d’affaire CMS DeBacker à Bruxelles avant d’intégrer l’ONG ECPAT INTERNATIONAL qui exerce dans la protection de l’enfance sise à Bangkok en Thaïlande.
Alors Vice-Présidente de l’Antenne Jeunes d’Amnesty International à Strasbourg, elle remporte en 2013 le Concours de plaidoirie – Moot Court de l’Institut des Hautes Etudes Européennes. En 2020, elle est lauréate du Prix du Public au Concours International de Plaidoiries du Mémorial de Caen, sur le thème des mutilations génitales féminines. Le Cabinet d’avocats Déborah DIALLO est impliqué dans la lutte pour les droits humains notamment ceux des femmes. Notre UNE du mois est consacrée à cette jeune dame. Elle nous parle de ses études et de l’admiration qu’elle porte pour son métier, plus qu’une profession mais une passion. Notre rédactrice en chef Maimouna Sow reçoit pour vous Maître Déborah Diallo, avocate.
Bonne lecture.

Etincelante : Déborah Diallo petite fille ressemblait à quoi ?
M.D.D : Il est toujours difficile de se décrire soi-même et surtout s’agissant de la période de l’enfance. J’ai le souvenir d’avoir été une enfant rêveuse et décidée. Décidée à accomplir un jour, un métier utile aux autres: celui d’avocate. Je rêvais de découvrir le monde tout en ayant à cœur de lutter contre les injustices.
Etincelante : Beaucoup d’enfants sont victimes de harcèlement physique et même moral au sein des écoles, quel est votre avis sur ces mauvais comportements
M.D.D : Il est vrai que le harcèlement scolaire est un fléau particulièrement difficile à combattre bien qu’inacceptable puisqu’il peut déboucher sur des suicides d’enfants. Finalement, l’école n’est rien de plus qu’une autre forme de société en miniature. Cela nous rappelle à quel point l’éducation transmise par les parents est primordiale car le respect de l’autre, la tolérance, ou encore l’empathie sont des valeurs qui commencent à la maison.
Etincelante : Expliquez-nous l’histoire de votre parcours scolaire, du primaire à l’université, et les autres ouvertures culturelles liées à vos formations
M.D.D : S’agissant de mon parcours académique, il commence en France, à compter de l’élémentaire. J’ai passé un Baccalauréat Littéraire option Théâtre. Ensuite, j’ai obtenu une Licence en Droit dans le cadre du parcours Erasmus en Grèce, un Master 1 en Droit International et Européen à l’Université Paris-Sud XI, un Master 2 en Droit Européen à l’Institut des Hautes Études Européennes à Strasbourg. Après cela, j’ai obtenu l’examen du Barreau en France me permettant d’exercer la profession d’avocate. Depuis lors, j’exerce cette profession à mon compte depuis près de 5 ans, tout en ayant ma casquette de Mandataire en transactions immobilières. Enfin, je suis titulaire du DIU en droit des affaires OHADA des Universités Assas et Paris-Nord.

Etincelante : Pourquoi avoir choisi le droit comme filière ?
M.D.D : J’ai choisi le Droit comme filière d’études parce que c’était le chemin dédié pour exercer la profession d’avocate. C’est véritablement une matière à la fois riche, variée et passionnante.
Etincelante : Parlez-nous de votre première expérience professionnelle
M.D.D : L’une de mes premières expériences professionnelles dans le milieu juridique, date de la période de mes études en Droit. Pendant près de deux ans, j’ai été assistante de justice à la Cour d’appel de Colmar. J’ai vraiment pu tirer parti de cette expérience avec la possibilité d’assister aux audiences, d’avoir accès à de nombreuses revues juridiques dans une magnifique bibliothèque et en travaillant en étroite collaboration avec l’équipe et les magistrats du Parquet Général. C’est important de multiplier les expériences professionnelles durant les études afin d’avoir une vision plus pratique des choses et développer son réseau.
Etincelante : Vous êtes à la tête de votre cabinet d’avocat Deborah Diallo, d’abord que ressentez-vous et est-ce que c’est facile de monter un cabinet d’avocat.
M.D.D : C’est une fierté pour moi d’exercer ma profession à mon compte. Je me sens parfaitement libre et indépendante dans ce cadre. Bien évidemment, il n’y a rien d’évident à la création d’un cabinet car c’est beaucoup de travail et de pressions à gérer entre les audiences, les dossiers, les deadlines, les clients… Il faut être bon dans sa profession et en même temps être capable d’être un bon chef d’entreprise pour avoir une activité pérenne. Fort heureusement, mon métier est passionnant et le jeu en vaut la chandelle.
Etincelante : Vous gérez combien d’employés directement et quelles sont les affaires que vous défendez le plus ?
M.D.D : Je souhaiterais recruter un collaborateur à l’avenir pour pouvoir me développer dans la mesure où gérer seule tous mes dossiers est un excercice compliqué. Dans cette attente, je suis ravie d’être Cabinet partenaire du Cabinet d’avocats ADALAW dont l’activité dominante est le droit des affaires et la propriété intellectuelle. En ce qui me concerne, je travaille essentiellement en droit privé, droit des affaires et j’ai également la casquette de mandataire en transactions immobilières. À côté de cela, je reste très impliquée dans la lutte pour la défense des droits humains.

Etincelante : Quel regard portez-vous sur les violences que subissent les femmes dans les foyers ?
M.D.D : Les violences intrafamiliales subies par les femmes sont monnaie courante dans le monde dans lequel nous vivons, à savoir dans des sociétés de type patriarcal. C’est d’ailleurs la première cause de mortalité des femmes en Europe. C’est totalement aberrant quand on se pose un instant pour y penser. Les violences basées sur le genre existent et tuent. Outre la nécessité de politiques publiques cohérentes, il faut repenser notre société et l’éducation transmise aux jeunes garçons et filles.
Etincelante : Vous en défendez certaines ? Des femmes battues ?
M.D.D : Dans le cadre de ma profession, j’ai régulièrement été amenée à défendre les intérêts de femmes victimes de violences physiques et sexuelles, que ce soit dans la cadre de la procédure d’ordonnance de protection (pour obtenir des interdictions d’entrer en contact et aménager les rapports avec les enfants) ou encore dans le cadre de procédures devant le juge d’instruction. Le but est d’obtenir une réponse adaptée dans un contexte d’urgence mais aussi d’obtenir justice.
Etincelante : Qu’est-ce qu’il faut pour être une bonne avocate ?
M.D.D : Une bonne avocate est humaine, courageuse, travailleuse, déterminée, et éloquente. Il faut avoir les épaules solides et surtout tout essayer pour obtenir le résultat souhaité.
Etincelante : Vous êtes d’origine Guinéenne, que connaissez-vous de la Guinée et quels sont vos projets s’il y en a pour ce dernier ?
M.D.D : Effectivement, je suis d’origine guinéenne, ce qui fait ma fierté. J’espère avoir la possibilité d’être utile à la terre de mes ancêtres, que ce soit professionnellement ou humainement. Quoiqu’il en soit, la République de Guinée fait partie de moi, à jamais.
Etincelante : Quel conseil donneriez-vous à cette petite fille ou étudiante qui aimerait faire la même carrière que vous, devenir avocate ?
M.D.D : Mon conseil serait de travailler dur, d’être motivée et surtout d’avoir des œillères quand il le faut. Malheureusement, les fillettes ne sont pas toujours encouragées à se dépasser professionnellement et dans leurs rêves. Alors, il est important de croire en soi et de ne jamais abandonner.
Etincelante : Quelle affaire défendue vous a le plus marquée depuis que vous avez créé votre cabinet ?
M.D.D : Beaucoup d’affaires m’ont marquées dans mon activité. Finalement des personnes que vous ne connaissez pas vous font confiance pour défendre leurs intérêts. Actuellement je dirai que je me bats pour rendre justice à une femme rwandaise ayant le statut de réfugiée en France et qui lutte pour faire venir sa fille mineure dans le cadre de la procédure de réunification familiale depuis plus d’une décennie. En dépit d’une décision du Défenseur des droits qui nous était très largement favorable, le Tribunal Administratif de Nantes a débouté ma cliente. Nous avons fait appel et nous ferons le maximum pour réunir ma cliente et sa fille.

Etincelante : vous étiez dans quel état, lors de votre toute première audience en tant qu’avocate ?
M.D.D : La première audience commence par une forte insomnie. C’est une consécration finalement après huit années d’études et beaucoup de sacrifices, donc bien évidemment c’est difficile de ne pas penser au parcours réalisé. Et surtout, une cliente dépend de vous. Je me rappelle bien de cette audience, en matière familiale où nous avions d’ailleurs obtenu gain de cause, les mains moites certes, mais tout de même victorieuse. Le stress peut être salutaire lorsqu’il est mis à profit à bon escient pour transcender un instant.
Etincelante : Des femmes et des petites filles continuent d’être maltraitées et violées un peu partout dans le monde alors que nous sommes au 21ème siècle, la faute à qui finalement ?
M.D.D : Effectivement des petites filles sont victimes d’abus dès le plus jeune âge et continuent de l’être tout au long de leur vie du fait de leur statut de femme. Les torts sont multiples: le patriarcat, les carences éducatives et l’absence de réponse efficace de la part des pouvoirs publics, bien qu’il soit bien évidemment complexe de lutter contre une problématique aussi ancrée dans nos sociétés. C’est décevant de constater qu’au XXIème siècle, une femme peut se sentir en danger quand elle sort seule, peut-être moins payée qu’un homme à compétences égales, peut subir des violences multiples du fait de sa condition de femme, tout en ayant à subir une charge mentale incroyable. Lutter contre toutes les formes de violence à l’encontre des femmes doit être la priorité de tous.
Etincelante : Quelles sont vos sources d’inspiration ? Et pourquoi ?
M.D.D : Mes sources d’inspiration sont multiples: les femmes de ma propre famille qui sont fortes, courageuses, indépendantes et ouvertes d’esprit. Et souvent de voir des personnes qui partent de rien ou presque et qui gravissent des montagnes, du fait de leur caractère et de leur envie. J’ai aussi un respect absolu pour Mme Christiane Taubira qui apporte beaucoup d’intelligence, de convictions, d’élégance et de poésie à notre monde qui semble bien déclin sur ces points.
Etincelante : A votre avis, être une femme est-il un atout dans ce secteur ou pas?
M.D.D : Je ne pense pas qu’être une femme soit un atout ou un inconvénient dans le milieu juridique et judiciaire. Mon éducation m’a poussé à dépasser ce type de clivages. Je crois en la force de l’esprit et du caractère propre à chacun, peu importe qui il est et d’où il vient.
Etincelante : Avez-vous déjà été témoin d’attitudes sexistes ?
M.D.D : Comme tout le monde j’imagine, j’ai été témoin ou victime d’attitudes sexistes. Je les combats fermement et elles ne sont pas susceptibles de m’impressionner. Les hommes contraints de rabaisser les femmes sont tout simplement eux-mêmes dépassés par leurs propres complexes et échecs. Une femme peut tout accomplir si elle s’en donne les moyens.
Etincelante : Quelles sont les causes qui vous tiennent à cœur ?
M.D.D : De nombreuses causes me tiennent à cœur: la défense des droits humains, l’éducation pour tous et des jeunes filles notamment, le développement du continent africain, la lutte contre la pauvreté, l’environnement… Beaucoup de causes méritent d’être défendues et qu’on lutte pour elles.
Etincelante : Est-ce vrai qu’il y a des affaires exclusivement dédiées aux hommes dans votre domaine ? Si oui, qu’en pensez-vous en tant que femme ?
M.D.D : À mon sens, il n’existe pas d’affaires exclusivement dédiées à des hommes. Il faut être qualifié et compétent, tout simplement.
Etincelante : Quelles difficultés rencontrez-vous au quotidien dans votre métier ?
M.D.D : Les difficultés au quotidien sont de plusieurs natures: le stress, la pression, les responsabilités, l’importante charge de travail également. Et puis parfois, l’enfer c’est les autres. Mais je ne changerai de profession pour rien au monde. C’est l’honneur de ma vie d’être avocate: d’être la voix des sans-voix, de vivre pour défendre.
Etincelante : Comment arrivez-vous à les surmonter ?
M.D.D : Je surmonte ces difficultés parce que j’ai les épaules solides. Et puis, je suis vraiment passionnée par mon métier donc j’ai conscience qu’il doit y avoir un revers de médaille. Mais il s’agit d’une goutte d’eau face à tout ce que cela m’apporte en réalité.
Etincelante : Quel est votre leitmotiv ?
M.D.D : Mon leitmotiv c’est Aut Caesar aut nihil, qui signifie Ou empereur ou rien. C’est la devise des ambitieux qui me pousse toujours à me dépasser et à en vouloir plus. C’est également Amor vincit omnia. L’Amour vaincra toujours. Je crois sincèrement aux qualités du cœur et au fait qu’elles constituent bien souvent la solution à tous nos maux.

Etincelante : Quelle est votre vision de l’avenir de la justice ?
M.D.D : La justice est un idéal. Ce ne sont que des personnes avec leurs failles qui tentent tant bien que mal de la réaliser sur cette terre. Alors j’ose espérer que ces personnes aspireront toujours plus à rendre vers cet idéal, en ayant à l’esprit l’honneur qu’il représente comme mission.
Etincelante : Un conseil à donner aux femmes ?
M.D.D : Les femmes doivent continuer d’aspirer à la liberté et à l’indépendance. Toujours se dépasser et sans doute être plus solidaires entre elles. On ne réussit jamais seule.
Etincelante : Que devons-nous retenir de vous ?
M.D.D : Ce qu’il faut retenir de moi: c’est que j’en ai toujours voulu. Toujours plus. Que je me suis donnée les moyens de mes ambitions, tout en gardant la foi dans les moments les plus rudes. Que je suis passionnée par la vie, par les arts, par mon métier et que je ne fais jamais les choses à moitié. Que j’avais un souhait: celui d’être utile aux autres et de m’éveiller intellectuellement.